Énergie et guerre en Ukraine : comment l’électricité, le gaz et les raffineries deviennent des enjeux stratégiques

Monde

Énergie et guerre en Ukraine : enjeux et évolutions

Trois hivers de conflit ont montré l’importance cruciale de l’énergie dans l’affrontement entre Moscou et Kiev. Dès le début du conflit à grande échelle en 2022, les frappes russes ont ciblé les réseaux électriques et gaziers ukrainiens afin d’affaiblir la population et de paralyser le pays. Aujourd’hui, Kiev réplique en s’attaquant au cœur même de l’industrie pétrolière russe.

Depuis août 2025, l’Ukraine a mené environ une trentaine d’opérations contre des raffineries et des dépôts de carburant à l’intérieur du territoire russe et dans les zones occupées, notamment en Crimée. Ces actions provoquent des pénuries dans certaines régions, des files d’attente à la station-service et une hausse des prix de l’essence. L’objectif est de peser sur l’opinion publique russe et, surtout, de réduire la capacité de la Russie à financer sa guerre.

Une analyse des intentions et des capacités

Selon un expert, l’Ukraine poursuit une logique similaire à celle qui prévalait mais avec une efficacité accrue, s’appuyant sur une meilleure maîtrise opérationnelle grâce à l’usage intensifié de drones et de missiles. L’objectif central est de diminuer la capacité de raffinage de la Russie, ce qui obligerait Moscou à choisir entre réserver les produits raffinés pour sa population ou les exporter pour gagner des devises.

Des incertitudes sur l’impact et le soutien logistique

Des médias évoquent une atteinte allant jusqu’à 38 % de la capacité de raffinage russe, sans que les chiffres soient entièrement vérifiables. Les sanctions occidentales compliquent également la remise en état des sites touchés, et la Russie ne peut pas importer certaines pièces essentielles. Les catalyseurs, indispensables au fonctionnement des raffineries, restent majoritairement d’origine occidentale et leur remplacement prendra du temps, avec des rendements potentiellement moindres.

Pour se protéger, Moscou cherche à installer des protections anti-drones, mais la couverture de l’ensemble des sites demeure difficile à réaliser. Selon des sources citées par le Financial Times, les États-Unis pourraient désormais fournir à Kiev des renseignements permettant de planifier certaines frappes.

La Russie et le gaz ukrainien : une autre dimension du conflit

En parallèle, la Russie poursuit ses attaques contre les infrastructures énergétiques ukrainiennes depuis le début de l’invasion en 2022. Au début du mois d’octobre, des dizaines de missiles et de drones ont ciblé les infrastructures gazières ukrainiennes. Des responsables de Kiev estiment que jusqu’à 60 % de la capacité de production a été touchée.

Selon une analyse, la tactique actuelle vise à frapper la production gazière dont l’Ukraine dépend fortement pour sa saison de chauffage, en s’attaquant tant aux sites de production et de stockage qu’aux gazoducs permettant l’importation si nécessaire. L’objectif affiché par Moscou est de priver l’Ukraine de gaz, qu’il provienne de sa propre production ou d’importations.

Résilience et retombées pour l’Europe

Malgré les dégâts, l’Ukraine parvient à s’adapter. Le système énergétique, autrefois très centralisé, voit émerger des productions locales renouvelables et des solutions énergétiques au niveau communautaire, avec l’utilisation accrue du gaz et des générateurs. Cette décentralisation forcée devient un pilier de survie.

Ces affrontements ont également des répercussions sur l’Europe. Les stocks de gaz dans l’Union européenne s’établissent autour de 83 %, contre plus de 90 % l’année précédente. Le risque d’un hiver rigoureux subsiste, et l’aide à l’Ukraine peut influencer la sécurité des approvisionnements. L’UE poursuit son objectif de cesser les importations de gaz russe d’ici fin 2027, une dynamique soutenue par les États-Unis qui voient dans le gaz naturel liquéfié américain une alternative majeure.

En s’en prenant à la production ukrainienne, Moscou envoie un message clair : malgré les sanctions, la dépendance énergétique européenne demeure un levier d’influence important. Ce sujet demeure central pour les décisions énergétiques et politiques de l’Union et de ses partenaires.

Les analyses et les reportages soulignent la complexité de ce sujet et ses implications géopolitiques durables.