Introduction au contrôle d’Internet en Russie
Depuis plusieurs années, la Russie met en œuvre des mesures visant à surveiller et à contrôler le trafic en ligne, tant en entrée qu’en sortie. La situation s’est encore renforcée à la suite de l’invasion de l’Ukraine en février 2022, avec une intensification des restrictions. De nombreux sites internationaux, tels que Facebook, YouTube, Instagram, ainsi que diverses plateformes médiatiques, sont désormais bloqués en Russie. L’état actuel de l’Internet dans ce pays, y compris dans les territoires ukrainiens occupés, est souvent désigné sous le nom de « RuNet ».
Les enjeux du blocage et la censure numérique
Les utilisateurs russes rencontrent de grandes difficultés pour accéder aux contenus étrangers, notamment sans recourir à un service VPN. Cependant, l’accès à ces réseaux privés virtuels devient de plus en plus limité. Certains VPN, autrefois utilisés pour contourner la censure, ne fonctionnent plus de manière fiable. Par ailleurs, d’après un rapport publié fin juin 2025 par Human Rights Watch, environ la moitié de la population n’a pas les compétences nécessaires pour utiliser ces outils, se limitant ainsi à consulter uniquement les sites qui ne sont pas encore bloqués par le gouvernement.
Décryptage du système de censure: témoignages et démonstrations
Swissinfo a sollicité Olga Sadovskaya, vice-présidente de l’organisation russe L’équipe contre la torture et de la Fédération mondiale contre la torture, pour expliquer le fonctionnement du « rideau de fer numérique » en Russie, avec ou sans VPN.
VOIR les explications d’Olga Sadovskaya :
Olga Sadovskaya détaille le fonctionnement du filtre numérique russe, en présentant les différences avec et sans VPN.
Les mesures de restriction des plateformes populaires
En juillet 2024, les autorités russes ont commencé à limiter l’accès à YouTube, très utilisé par environ 55 millions de personnes en Russie. Ces mesures ont été justifiées comme étant « nécessaires » par l’État. Selon le centre de recherche indépendant Levada, près de 40 % des Russes auraient alors recours aux VPN pour contourner ces restrictions.
La répression s’étend aux services de messagerie
Le 13 août, Roskomnadzor, l’organisme en charge de la régulation des médias, a restreint les appels sur WhatsApp et Telegram, dénoncés comme étant des outils pouvant servir à des activités de sabotage ou terroristes. Par ailleurs, Google Meet a rapidement gagné en popularité en Russie, se plaçant parmi les applications gratuites les plus téléchargées sur l’App Store local. Cependant, certains médias en exile évoquent déjà des signes d’instabilité du service et des avertissements selon lesquels son interdiction pourrait être envisagée.
Un contexte mondial de contrôle de l’Internet
La Russie rejoint un panel de nations autoritaires limitant l’accès au web. La Chine, en particulier, a mis en place depuis la fin des années 1990 ce que l’on connaît sous le nom de « Grand pare-feu » ; au fil du temps, Pékin a accru ses restrictions. Certains sites, tels que Skype et WhatsApp, autrefois accessibles aux internautes chinois pour communiquer avec l’extérieur, sont désormais totalement bloqués. Depuis plus d’une décennie, ces mesures limitent la liberté d’accès à l’information dans le pays.
Réactions et divisions au sein de la société russe
Selon le centre Levada, l’opinion publique en Russie est divisée face à ces mesures. Les populations plus âgées montrent davantage de soutien aux restrictions, notamment en 2018 lorsque près de la moitié d’entre elles étaient favorables au blocage de Telegram. Sur le plan géopolitique, les Russes considèrent souvent la Biélorussie, la Chine, l’Inde, le Kazakhstan et la Corée du Nord comme leurs principaux alliés, tandis que leurs relations avec l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Ukraine, les États-Unis et la Pologne sont perçues comme davantage hostiles. Pour la première fois en vingt ans, les États-Unis ont quitté la première position des pays perçus comme ennemis, se plaçant désormais en quatrième position.